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mardi 8 mai 2018

La communauté de l'étang du Méjean


J'ai été fasciné par la grâce aérienne des échasses blanches mais l'étang du Méjean offre un abri protecteur à toute une communauté d'espèces qui mériteraient chacune qu'on s'y attarde. Les plus spectaculaires sont les cigognes. On leur a aménagé des perchoirs artificiels en remplacement des bons vieux toits d'autrefois. On peut ainsi les voir de plus près, sans les déranger, mais cette intervention artificielle de l'homme enlève un peu de poésie à leur présence.

D'une manière générale, c'est tout le parc ornithologique qu'on peut qualifier d'artificiel. Non qu'il y ait d'autres aménagements aussi visibles. Mais le cheminement des voyeurs humains, bien canalisé sur les chemins, habitue les animaux à la présence humaine et permet de les approcher. Au bord de l'étang de Vacarès, en Camargue, c'est une autre histoire.

Le plus étonnant, ce ragondin surpris sur le chemin, alors que le parc allait fermer et que les rares visiteurs avaient regagné la sortie. J'avais fait le pari de risquer d'arriver trop tard à la grille. Ce qui fut le cas. Elle était apparemment fermée. Mais le sympathique et jeune garde du Conservatoire du littoral n'avait pas fermé le cadenas, laissant un délai de grâce à l'attardé que j'étais. Je n'étais sûrement pas le seul, au fil des jours, à ne pouvoir s'arracher à ce spectacle magique de la beauté sauvage.

J'avais vu plusieurs ragondins sur ce chemin. Ils avait fui rapidement. Celui-ci n'arrivait pas à abandonner l'herbe bien verte qui faisait ses délices et je dus pratiquement l'enjamber.



Il m'ignorait superbement. Cette indifférence n'est pas la règle. Généralement, les animaux, les oiseaux en particulier, ne se laissent pas troubler tant que le visiteur chemine ou ne s'arrête qu'un court instant. Mais que l'on se fige pour observer, a fortiori avec un gros truc noir dirigé vers lui, alors il regarde attentivement quelques secondes, avant de se rassurer : le bipède sans plumes n'a pas d'ailes dans le dos et il va rester gentiment sur la rive. Alors on continue son repas ou sa toilette.

Échasse blanche 

Tadorne de Belon (mâle) 

Goéland 

Héron cendré





Pour mieux me voir, cette cigogne change son angle de vue.
Je suis dans un observatoire, et il ne lui est pas facile de juger de la dangerosité de l'intrus.


 Ce beau lézard ocellé (près de 20 cm) se fige lui-aussi, mais c'est moins pour voir que dans l'espoir de ne pas être vu.




Il me laisse d'admirer ses griffes étonnantes, avec ce très long doigt plutôt inquiétant.


C'est qu'il faut toujours être attentif au danger. J'ai aperçu l'ombre fugace d'un renard et dans le ciel, une seule fois, un rapace qui volait trop haut pour que ma photo permette de l'identifier.


Mais passés ces quelques frissons, la vie est paisible. Voici un couple de Tadornes de Belon. Pour une fois, chez les canards, mâle et femelle sont aussi colorés l'un que l'autre. Une taille un peu plus grande (c'est déjà de grosses bêtes, proches de l'oie), et sutout un bourrelet rouge au dessus du bec distinguent le mâle.

 Tadorne de Belon à côté d'une échasse blanche.

On ne voit le bleu pétrole de ses ailes que lorsqu'il vole.





Autant les tadornes sont colorés, autant les aigrettes garzettes sont unicolores, d'un blanc magnifique avec une touche de noir sur le bec et de jaune et de bleu près des yeux. Pas faciles à approcher mais cela permet de figer leur vol magnifique car elles fuient généralement latéralement, offrant leur beau profil, contrairement à la plupart des oiseaux qui s'éloignent de l'observateur. J'ai surpris celle-ci à sa toilette.



En vol, on est frappé par leurs pieds tout jaunes.



Leur apparition est d'autant plus touchante qu'elle est fugace, au milieu de tous ces roseaux.





En revanche, les avocettes étaient concentrées à un même endroit, dans un de ces petits étangs entre la terre ferme et l'étang du Méjean proprement dit, qui offrent un cadre merveilleusement circonscrit. Elles étaient particulièrement belliqueuses, malgré l'espace généreux qui aurait dû permettre à chacun de vivre en paix avec sa compagne.

Avocettes sur fond de flamands roses (pas très roses !) 






En revanche, les hirondelles sont très nombreuses. Elles s'agglutinent à certains endroits dans une ronde échevelée. Mais Dieu qu'elles sont difficiles à photographier !


Les hérons sont tout aussi nombreux et plus facilement attrapables dans la lucarne étroite du téléobjectif. Dans cet arbre, j'en ai vu au moins 4.




Cet autre se repose, avant la pêche du soir, près d'une écluse qui régule la circulation de l'eau du marais.




J'ai pu assister à cette pêche du soir depuis l'observatoire auquel on peut accéder à toute heure, contrairement au parc ornithologique où l'on préserve la tranquillité des couvées en le fermant à 18h. Le héron marche lentement dans l'eau peu profonde puis pique du bec dans l'eau brutalement. Il réussit, semble-t-il, presque à chaque fois mais je n'ai jamais pu voir le poisson. Il est déjà dans le gosier et on le voit descendre dans le cou. Quel morfal ! Il n'arrête pas.







Dans ce même trou d'eau, les cigognes se relaient pour venir boire et manger pendant que l'autre garde le nid.






De temps en temps, elles s'ébrouent en déployant leurs ailes immenses, juste pour se détendre.





Puis elles reprennent la pose, une patte en l'air. Elles se rengorgent ce qui leur donne une allure un peu prétentieuse et, pourquoi ne pas le dire, un peu bête.


Tout est calme, il n'y a plus aucun humain à proximité. On se sent privilégié, comme si tous ces animaux vous avaient invités pour un temps dans cet univers bizarrement tout à la fois cruel et paisible. Qu'il est dur de s'en arracher. Mais il y a encore 4 heures de route. Je n'ai plus le temps. Et pourtant il aurait fallu parler aussi de ces mouettes rieuses, si pénibles quand elles embêtent les échasses blanches, mais si belles.




... et aussi des chevaux qui circulent au milieu de toute cette sauvagerie.

Ici, pas de héron pique-boeuf. C'est un merle qui occupe la place.

...sans oublier, bien sûr, les flamands roses, pas très roses ici, faute sans doute d'une nourriture appropriée. Pas de très grands groupes ici, comme en Camargue, mais la surprise de découvrir un couple dans une brusque échancrure de la rosière.


ici, à côté d'une aigrette garzette.

Mais, à tout seigneur, tout honneur, je termine sur une majestueuse cigogne, brièvement caressée par un des rares rayons de soleil de la journée.


... et c'est le crépuscule. Ciao mia bella !

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